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415 JOURNAL SANS DATES

CONVERSATION AVEC UN ALLEMAND

QUELQUES ANNÉES AVANT LA GUERRE

Je voudrais que l'on ne se méprît pas sur le sentiment qui me fait donner ici ces notes. Je les crois d'un certain intérêt psychologique ; mais, bien que quelques traits de la figure de B. R. accusent une inquiétante ressemblance avec ceux que certains nous baillent aujourd'hui pour les plus marquants de la race germanique, je doute qu'il soit pru- dent de s'attacher trop à leur valeur représentative. Libre au lecteur de généraliser ; je n'ai fait ici, d'après nature, que le portrait d'un individu, à une époque oii aucune des considérations ne pouvaient intervenir, qui risquent aujour- d'hui de fausser un peu notre peinture. Je transcris ces notes, sans y rien changer, telles que je les pris en juin 1904 le lendemain du jour de cette unique rencontre.

A. G.

Dans le hall de l'hôtel, où j'arrive très exactement à l'heure dite, B. R. m'attendait depuis une demi-heure déjà ; assis en face de la porte, il tenait ostensiblement à la main, pour m'aider aie reconnaître, l'enveloppe du message par lequel je lui avais donné rendez-vous. Je m'avançai incertain dans le hall. Je vis aussitôt cette figure glabre, comme passée au chlore, ce corps trop grand pour qui tous les sièges sont bas... Je souhaitai ardemment que ce fût lui. C'était lui. Von M. n'avait pas exagéré son élégance. B. R. était parfaitement mis, paraissait plus

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