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696 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Ainsi, malgré ce voile indéchirable qui m'entoure, ainsi l'amour a pénétré jusqu'à moi, et rien n'a su m'en défendre ! Il m'aime, je crois en Dieu ! Il n'y a plus de mort pour moi, il n'y a plus de nuit ! Ah ! le bonheur est une chose si grande qu'il n'était pas en mon pouvoir de lui échapper !

Il y a beaucoup de femmes plus belles que moi, et cependant c'est moi qu'il a choisie! Il y a beaucoup de fenunes qui sont capables de voir, et moi j'ai les yeux fermés à toute autre chose que son amour !

Loué soit Dieu parce que je lui ai paru désirable ! loué soit Dieu, parce qu'entre toutes il a désiré ces choses seules que j'étais en état de lui donner !

J'étais donc dans ma nuit sans le savoir maîtresse de ces grands trésors !

Ah ! puisqu'il m'a aimée aveugle, c'est d'être plus aveugle encore que je désire !

Et non seulement que je ne le voie pas, mais qu'il ne me voie pas non plus et non plus ce visage périssable, mais cette chose seulement que je lui ai donnée et qui est à lui, et que ni la vie, ni la mort ne seront capables de lui arracher !

Et puisqu'il m'a aimée dessaisie, c'est d'être plus pauvre encore que je désire, gratuite entre ses bras, inexpUcable à tous.

Et au regard de cet honneur que le monde accorde, plus dépourvue qu'aucune de celles-là sur qui im nom juif est écrit !

Dans la nuit où j'étais, il a bien su me trouver et s'il faut maintenant que lui aussi disparaisse aux yeux de ceux qui voient,

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