Aller au contenu

Page:NRF 13.djvu/745

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LA SYMPHONIE PASTORALE 737

chose est d'avoir à se reposer sur Dieu ou à se décharger sur autrui. Il m'apparut bientôt que j'avais déposé sur les bras d'Amélie une lourde tâche, si lourde que j'en demeurai d'abord confondu.

Je l'avais aidée de mon mieux à couper les cheveux de la petite, ce que je voyais bien qu'elle ne faisait déjà qu'avec dégoût. Mais quand il s'agit de la laver et de la nettoyer je dus laisser faire ma femme ; et je compris que les plus lourds et les plus désagréables soins m'é- chappaient.

Au demeurant, AméUe n'éleva plus la moindre protes- tation. Il semblait qu'elle eût réfléchi pendant la nuit et pris son parti de cette charge nouvelle ; même elle y semblait prendre quelque plaisir et je la vis sourire après qu'elle eût achevé d'apprêter Gertrude. Un bonnet blanc couvrait la tête rase où j'avais appliqué de la pom- made ; quelques anciens vêtements à Sarah et du linge propre remplacèrent les sordides haillons qu'Amélie venait de jeter au feu. Ce nom de Gertrude fut choisi par Charlotte et accepté par nous tous aussitôt, dans l'ignorance du nom véritable que l'orpheline ne connais- sait point elle-même et que je ne savais où retrouver. Elle devait être un peu plus jeune que Sarah, de sorte que les vêtements que celle-ci avait dû laisser depuis un an lui convenaient.

Il me faut avouer ici la profonde déception où je me sentis sombrer les premiers jours. Certainement je m'étais fait tout un roman de l'éducation de Gertrude, et la réa- hté me forçait par trop d'en rabattre. L'expression indif- férente, obtuse de son visage, ou plutôt son inexpres- sivité absolue glaçait jusqu'à sa source mon bon vouloir.

47

�� �