Page:NRF 13.djvu/787

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

RÉFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE 779

théâtre, ce n'est jamais qu'une question de plus et de moins et les deux éléments nécessaires demeurent toujours unis. Précisément cette distinction du plus ou du moins portera peut-être quelque clarté dans la question du théâtre qui nous occupe ici et qui après ce détour nous apparaîtra sous une meilleure lumière.

��Notons d'abord que si le théâtre nous a montré parfois, avec Hamlet, que l'action n'est pas la sœur du rêve, il nous fait voir toujours en elle la sœur du discours, rend claire cette union de l'action et du discours que nous avons posée en face du thème comme le premier terme d'un couple. L'action au théâtre se forme, s'exprime, s'éclaire, se ralentit, se précipite par des discours et des arrêts de discours : le poète dramatique emploie les discours pour exprimer l'action comme le peintre emploie les couleurs pour exprimer la lumière.

Ceci posé, il y a des auteurs dramatiques qui conçoivent leur œuvre essentiellement en discours et en action, d'autres qui la conçoivent essentiellement en thèmes, et ces derniers ne constituent pas comme dans la sculpture une exception foudroyante mais, à l'exemple de la peinture, comme un demi-chœur qui paraît sensiblement égal à l'autre. Chez les Grecs, Sophocle et Euripide seraient des premiers, Eschyle des seconds. Une pièce de Sophocle est conçue avec la même raison constructive, la même action ordonnée qu'une toile de Raphaël. Ajax, Philoctète, Œdipe, une fois le minimum de thème, l'esquisse générale donnée, entrent peu à peu dans l'inspiration de leur auteur comme les parties d'une œuvre vivante qui s'agencent aisément et puissamment. Mais le Prométhée, les Perses, les Sept, les Euménides com-

�� �