8o8 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
réflexe en aucun domaine. Il faut que cela traverse d'abord le cerveau, et c'est pourquoi tout leur peut être expliqué, — de ce qui se laisse expliquer, bien entendu. — Or, comme on explique aussi bien et encore mieux la mauvaise peinture que la bonne, mais que la bonne s'explique aussi, et la litté- raire, le néo-impressionnisme au même titre que le cubisme, une série de ces und finit par se comprendre, tout au moins par se concevoir.
On distingue dans la critique allemande deux grands courants : l'un, auquel ressortit la citation par où débute ma note d'aujourd'hui, est dans la ligne de l'Allemand d'autre- fois : livresque, métaphysique, idéaliste, étranger à la vie. C'est celui de la critique esthétisante et théorique. Si ses productions nous paraissent bizarres parfois jusqu'au comique, cette critique est pourtant moins antipathique que l'autre, que j'appellerais volontiers la critique désinvolte, celle qui opère avec des expressions techniques, en se servant du jargon d'atelier et des marchands de tableaux, et dont Meier- Graefe, que l'on n'a que trop connu à Paris autrefois, reste le représentant le plus typique ; si typique qu'il y aura lieu de revenir un peu plus longuement tout à l'heure sur son cas.
La critique esthétisante pousse l'abstraction jusqu'à faire une théorie de la beauté ornementale du paysage, avec gra- phiques, schémas géométriques, etc.^
L'échantillon cité plus haut n'a rien d'exceptionnel. Je crois qu'on y pourrait puiser une foule d'indices intéres- sants sur la constitution de la cérébralité allemande. Pen- dant la guerre il a paru un livre de cet ordre, plein d'idées, une étude étrange, excitant la pensée, théorie ingénieuse du phénomène qu'est l'art gothique : der Gothik Formprobleme, par Wilhelm Worringer. Il fait suite à un petit traité d'esthé- tique qui a pour titre Ahstraktion und Einfiihlung («Abstrac-
I. Hugo Marc us : Die ornamentaîe SchOnheit der Landschaft.
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