Page:NRF 13.djvu/908

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

900 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

tueusement lui dit qu'il voudrait bien savoir enfin la vérité. Avait-il oui ou non pris le porte-monnaie. Julien répondit : — Je ne l'ai seulement jamais vu.

Puisque nous sommes convoqués ensemble devant le juge de paix, j'emmène Julien avec moi en tacot. Nous sommes seuls l'un à côté de l'autre ; il ne semble pas méfiant. Je profite de ces quelques moments pour lui recommander de n'en pas dire plus qu'il n'a fait réelle- ment. On ne lui demande pas de s'accuser, mais de dire simplement ce qu'il sait. Personne ne lui veut de mal, etc. Dolet lui a fait les mêmes recommandations avant le départ. Je n'ose vraiment pas lui préparer davantage ses réponses, tant son rôle est désormais facile.

Arrivé à D., j'ai un instant de conversation avec le grefiQer qui est jeune, aimable et semble ouvert. Puis le juge de paix arrive. C'est un petit homme de soixante- cinq ans, dans le visage de qui l'on ne remarque que les globes des yeux passablement saillants. On le dit indulgent. Il ordonne à Julien d'aller s'asseoir sur une chaise, dans le couloir, et j'entre dans les explications les plus détaillées. Je complète ma première déposition, je la rectifie sur une série de points qui n'ont été précisés que depuis. J'indique toutes les contradictions de l'enfant. J'insiste à l'excès sur la distraction possible de ma femme, sur la hardiesse que supposerait la restitution, bref je rédige un plaidoyer selon toutes les règles. Il me semble avoir persuadé le greffier, mais je vois bien que le juge reste sceptique. Je sors en lui laissant, avec le vrai porte-monnaie, mon carnet de poche, pour qu'il essaie si JuHen ne s'y trompera pas.

�� �