d'une organisation du travail intellectuel 319
et cerné autrement que par une marche concentrique de tous les esprits ?
Je ne crois pas qu'il soit dans la pensée de l'auteur des pages qu'on va lire, de nier tout avenir au génie, ni même d'insinuer qu'il peut être suppléé par une simple coopé- ration des intelligences moyennes. Il n'ignore pas qu'on ne pourra jamais faire qu'une idée apparaisse ailleurs qu'oie il lui plaît : elle choisira toujours un cerveau par- ticulier pour s'y déclarer ; et partout où manquera ce cerveau, si nombreuses soient les forces mobilisées, elle manquera irrémédiablement elle aussi.
Mais la question se retrouve de savoir si pour permettre cet éclair individuel du génie, il n'est pas désormais néces- saire que la masse des intellectuels s'arrache au désordre et à la dispersion où elle continue de vivre, et s'organise, suivant un plan ^ ensemble, en une véritable société. La vérité restera sans doute à jamais une proie privilégiée, dont ne pourra s'emparer que le chasseur délite. Mais sa capture ne peut-elle, ne doit-elle pas être préparée par une battue générale ?
En d'autres termes, le moment n est-il pas venu où le travailleur intellectuel de l'espèce commune va être obligé de renoncer à tout dessein privé et où son activité n'aura plus de sens que si, s' agrégeant à celle de ses pareils, elle s'emploie à réduire la part de l'inconnu et du hasard et à consommer l'œuvre critique sur laquelle les tentatives du génie, pour avoir quelque chance d' aboutir , devront inévi- tablement s'appuyer ?
C'est la question que pose l'article qu'on va lire. L'es- sence de la thèse qu'il soutient, lui interdit de prétendre la trancher à lui seul. Mais il met en mouvement des idées
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