Page:NRF 14.djvu/670

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

664 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

retrouver quelques camarades dans une grande allée du Luxembourg: celle qui s'achevait à la boutique du père Clément ; on jouait au ballon. Ce n'était pas encore hélas ! le foot-ball ; le ballon était tout pareil, mais les règles étaient sommaires, et, tout au contraire du foot- ball, il était défendu de se servir des pieds. Tel quel^ ce jeu nous passionnait.

Mais je n'en avais pas fini avec la question du cos- tume : A la mi-carême, chaque année, le Gymnase Pascaud donnait un bal aux enfants de sa clientèle ; c'était un bal costumé. Dès que je vis que ma mère me laisserait y aller, dès que j'eus cette fête en perspective, l'idée de devoir me déguiser me mit la tête à l'envers. Je tâche à m'expliquerce délire. Quoi 1 se peut-il qu'une dépersonnalisation puisse déjà promettre une telle félicité ? A cet âge déjà ? Non : Le plaisir plutôt d'être en couleur, d'être brillant, d'être baroque, de jouera paraître qui l'on n'est pas... Ma joie fut infiniment rafraîchie lorsque j'entendis Madame jardinier déclarer que, quant à julien, elle le mettrait en pâtissier.

— Ce qui importe, pour ces enfants, expliquait-elle à ma mère (et ma mère aussitôt acquiesçait) c'est d'être costumés, n'est-ce pas. Peu leur importe le costume.

Dès lors, je savais ce qui m'attendait; car ces deux dames, consultant un catalogue de La Belle Jardinier e, découvraient que le costume de pâtissier — tout au bas d'une liste qui commençait par le petit marquis, et continuait decrescendo en passant par le cuirassier^ le polichinelle, le spahi, le lazzarone — de pâtissier^ dis-je, était « vraiment pour rien ».

Avec mon tablier de calicot, mes manches de calicot,

�� �