Page:NRF 15.djvu/574

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

568 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Elle rend toutes sortes de grâces à ses éducatrices, quand Prisca commence :

« Cette Marie n'aura-t-elle pas été la fiancée de vos deux fils ?

— Une paysanne, dit Godichon, que le luron n'a pas voulue, que le distingué épouse.

— Pourquoi l'épouse-t-il ? dit Prisca.

— Parce qu'elle est blonde, parce qu'elle est sotte, ou parce qu'elle est dotée ? » interroge Godichon.

Sa mère se tait. Elle pense que son fils aîné a pris chez les Pincengrain un peu d'esprit et encore plus de méchanceté. Godichon continue :

« Il suffisait que les vingt mille francs de Marie ne sortissent pas de la famille. Je n'irai pas aux noces. Nous approuverions par notre présence un mariage intéressé, et je craindrais de retrouver dans la femme de mon frère ma fiancée d'autrefois. Question de déli- catesse ! »

Madame Godichon supplie. Godichon résiste. Sa mère trouve qu'on prend de la ténacité à vivre parmi des femmes silencieuses.

��Madame Godichon est partie. Les Pincengrain et Godichon se sentent rapprochés parce qu'ils ont un sujet de conversation nouveau. Ils peuvent dire ensemble du mal de quelqu'un, du fiancé de Marie, et se moquer de Marie. Véronique fait mine de les retenir et pique des deux. Une ardeur joyeuse illumine le front des saintes, où perce la haine. Ils n'épargneront même pas

�� �