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REFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE 597

Stricte, et cette contradiction laisse beau jeu à ceux qui donneraient volonlicrs de Gide la définition que Moréas donnait de Sainte-Beuve : un naturel tortueux surexcité par l'intelligence. Mais cette apparence doit être redressée.

11 va là au contraire, ou, si l'on veut, aussi bien, l'expres- sion d'une parfaite loyauté intellectuelle. En réalité aucune de ces deux études de psychologie religieuse n'implique de conclusion positive, ou plutôt chacune des deux corrige et détruit ce que l'autre pourrait pré- senter comme apparence de conclusion positive. Les conclu- sions positives sont des abstraits, des coupes théoriques- sur la vie ; l'auteur des Xoiirriliircs Terrestres les écarte pour épouser directement et authentiquement la vie. 11 ne présente pas à la critique ce bloc d'idées arrêtées par lequel elle aurait prise sur lui et le cataloguerait parmi les tenants ou les auteurs d'une doctrine. Tant mieux après tout : il ne faut pas que la critique soit, comme le pasteur de la Sym- phonie, victime de la facilité et de la porte large.

Je rappelais tout à l'heure Ibsen (et, entre parenthèses, les- dialogues de la Symphonie nous font parfois regretter que l'œuvre n'ait pas été exécutée sous la forme dramatique, qu'elle me semble fort bien comporter. Il est vrai qu'alors « la scène à faire » eût été la même que celle de la Mcissièrc). Le Canard Sauvage, Un Ennemi du Peuple, Rosinersholm paraissent de même impliquer des conclusions contradic- toires. Les critiques français, dont l'éducation s'était faite dans la pièce à thèse d'Augier et de Dumas, en ont été trou- blés, ou bien ont essavé de concilier ces contraires et de prêter à Ibsen des thèses générales et permanentes. Du jour où Ibsen eût déclaré et expliqué que la scène était pour lui un lieu de vie et non une chaire à thèses, il leur parut moins intéressant. Or les romans de Gide sont comme les pièces d'Ibsen des points de vue vivants sur un problème, non des plaidoyers pour la solution de ce problème. Le contraire de

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