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Page:NRF 15.djvu/661

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l'enseignement de CÉZANNE 6$$

aux sens : il ne perd pas de vue l'universel, et s'il cesse de le voir directement, et pour ainsi dire « sur mesure », il l'évoque constamment, à travers l'accidentel des sen- sations visuelles qu'il sait limiter. La perspective italienne peut être définie : une convention basée sur les sensa- tions de l'œil, mais dont le but ne cesse pas d'être géné- ralisateur. Grâce à la sagesse dans l'emploi des nouvelles formules, toute oblique convergeant vers un point fixe implique l'horizontale réelle, tout ovale est relié par les voies de l'esprit au cercle initial, et tout cercle particulier, quittant l'objet qui le supporte, comme les ondes issues d'un caillou jeté dans l'eau, se propage sur la toile jusqu'à envelopper l'œuvre tout entière d'un mouvement éternel et fermé.

Lorsque l'heure des sacrifices historiques eut sonné à nouveau, les impressionnistes, obéissant à l'impulsion ancienne, achevèrent ce mouvement de conversion ébau- ché par la Renaissance. Cela les amena à faire, si j'ose continuer la figure, un demi-tour complet. Ils se trou- vèrent face à la réalité. Sans voiles, mais le dos tourné au mur d'où naquit jadis la raison d'être du peintre. Dès lors, n'ayant plus sous les yeux le cadre architectural où jusque-là s'inséraient tous les travaux de l'artisan, ils poussent jusqu'au bout l'étude des phénomènes opti- ques, les enregistrant sans choix. Fidèles à leur position apostatique, ils renoncent au frein que les Renaissants - inventèrent. Le tableau entièrement Hbéré de la tutelle murale n'offre aucune résistance aux éléments dissolvants venus du dehors. Grâce à cette entière liberté de recher- che, les gais explorateurs sans souci mettent au jour, mélangés à de nombreuses scories, des matériaux nou-

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