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LES REVUES 807

Vous laissez le beau linge blanc aux belles femmes : vous ne mettez sur vous que des toiles d'araignée, bleues, vertes, roses, et si bizarrement coupées que votre pantalon ne ressemble à rien.

L'on vous découvrirait trop au travers s'il n'y en avait tant que vous superposez exprès, sachant que votre forme a moins de pouvoir, imparfaite, que leur légèreté et leur chaleur.

Vous ne laissez pas voir beaucoup plus que vos bras et votre épaule, mais l'on ne sait plus jusqu'où monte la soie de vos deux bas.

Si vous versez une mortelle douceur dans toutes les veines, une à une, votre tête n'est pourtant rien. Qu'une ombre. La gouache d'un éventail.

J'étais, il y a cinq ou six ans, dans une grande ville de Lombardie, à la fin de l'été. Je m'étais pris d'amitié pour l'une de ces esclaves bénévoles que je voyais dans la plus belle salle du monde au plafond voûté et très bien peint. J'aimais à m'y trouver à la fin de l'après-midi. Les hautes persiennes vertes à jalousies mettaient aux murs couleur de pourpre une grille d'or. Le mobilier était d'ébène et de damas rouge ; ce Louis XV du Second Empire entremêlé de poufs avait vu des ambassadeurs et des princes... Mon amie s'appelait donc Florence. Elle ressemblait à votre Polaire et même elle en tirait vanité, lorsqu'elle cédait à un idéal cosmopolite. Mais elle avait une beauté plus étoffée. Je n'étais pas sans avoir remarqué chez elle quelque chose que je n'avais pas la fatuité de préciser. Il arriva qu'un jour elle ne demeura plus maîtresse de cacher son trouble : et cette fois je voulus savoir. Première réponse : un haussement d'épaules. J'insistai, ce que je regrette à présent puisque je blessais certainement ce cœur où, malgré tout, la pudeur s'était réservé un dernier refuge, le silence. L'on me répondit à la fin, en levant toujours les belles épaules : « Pur troppo ! » C'est-à-dire : « Il n'est que trop vrai ! »

Lorsque l'homme remet son manteau, celle qu'il a choisie et qu'il va quitter, dit son nom... Quoi donc ? A-t-elle espoir que cet éphémère lui revienne ? Veut-elle manifester qu'elle existe aussi, et ne pas demeurer dans votre mémoire une figure anonyme ? Il se

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