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l68 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

jour. Attendons la nuit... Nous l'avons pendu trop tôt... n'ai-je pas la fièvre, Mac Graw ? »

Mac Graw, dans la demi-obscurité de la cour, iha. le poi- gnet de Pew : « Ce n'est rien », fit-il.

Nous restâmes assis sur les marches de l'escalier, tous les trois, sans dire un mot, devant le mort au bonnet pointu.

— J'ai toujours mal... au cœur... dit encore Pew. » Il se pencha un peu en dehors de la marche pour vo- mir.

— Va plus loin, porc ! » dit iMac Graw.

Nous attendions la nuit de même qu'un voleur expirant sur la roue, la mort. Les minutes s'écoulaient lentement et le soleil, aperçu au-dessus de la cour comme du fond d'un puits, ne voulait pas replier ses rayons homicides.

— J'ai... » dit Pew.

Il n'osait pas se plaindre. Et je surpris dans l'ombre Mac Graw qui lui-même tâtait son artère au poignet, avec une inquiétude sournoise.

Et avec la nuit, cependant que les mauvaises odeurs humides montaient de terre, nous franchîmes la porte de la demeure du peintre des démons.

Pew ne pouvait pas marcher car ses jambes étaient molles. Nous le soutenions par les poignets et nous sentions son sang battre le long de ses veines, dans nos mains crispées.

L'odeur de chair brûlée persistait sur la ville. Un grand vol de corbeaux et de vautours passa au-dessus de nous en poussant des cris variés ; certains gémissaient comme des enfants.

Pew s'écroula enfin malgré nos efforts. Nous le laissâmes aller sur le sol. Il leva vers Mac Graw des yeux merveilleu- sement intelligents.

— Ici, Mac, fit-il, en montrant son cœur, fais vite. » Et Mac Graw, penché vers lui, comme pour lui regarder la langue, appuya de tout son corps sur son couteau

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