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Page:NRF 16.djvu/263

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EUPALINOS OU L'ARCHITECTE

DIALOGUE DES MORTS *

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Phèdre. — Que fais-tu là, Socrate ? Voici longtemps que je te cherche. J'ai parcouru notre pâle séjour, je t'ai demandé de toutes parts. Tout le monde ici te connaît, et personne ne t'avait vu. Pourquoi t'es-tu éloigné des autres ombres, et quelle pensée a réuni ton âme, à l'écart des nôtres, sur les frontières de cet empire transparent ?

Socrate. — Attends. Je ne puis pas répondre. Tu sais bien que la réflexion chez les morts est indivisible. Nous sommes trop simplifiés maintenant pour ne pas subir jus- qu'au bout le mouvement de quelque idée. Les vivants ont un corps qui leur permet de sortir de la connaissance et d'y rentrer. Ils sont faits d'une maison et d'une abeille.

Phèdre. — Merveilleux Socrate, je me tais.

Socrate. — Je te remercie de ton silence. L'observant, tu fis aux dieux et à ma pensée le sacrifice le plus dur. Tu as consumé ta curiosité, et immolé ton impatience à mon âme. Parle maintenant librement, et si quelque désir te reste de m'interroger, je suis prêt à répondre, ayant achevé de me questionner et de me répondre à moi-même. — Mais il est rare qu'une question que l'on a réprimée ne se soit pas dévorée elle-même dans l'instant.

Phèdre. — Pourquoi donc cet exil ? Que fais-tu, séparé de nous tous ? Alcibiade, Zenon, Menexène, Lysis,

��I. Extr.iit d'Architectures, à paraître aux éditions <ie la Nouvelle Revue Française.

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