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210 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

surtout de nos jours où « elle nous est présentée à notre porte par un messager hagard et tout en sang ». Malgré bien des défauts peut-être, Léon Bloy certes s'est efforcé d'être saint. S'il n'a pas été favorisé, déclare-t-il, par des extases et des grâces ce sensibles », comme disent les mystiques, toute sa vie, il le croit fermeraant, a été baignée dans le surnaturel. Rien n'est plus loin de lui que la médiocrité !

EMILE DERJLENGHfM

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SOUVENIRS DE MON COMMERCE, par André Rou- veyre, avec douze bois originaux de l'auteur (Crès).

M. André Rouveyre, dont le burin est cruei et k style tour- menté, est un ami fidèle, mais perspicace. La partie de ses sou- venirs qui a trait aux relations de Remy de Gourmont et de l'Amazone est tout à fait remarquable de finesse, de pénétration — et de sympathie, car l'auteur ne croit jamais devoir prendre le ton d'ironie supérieure. Il ne juge jamais ceux qu'il aime ; il nous donne, mêlant qualités et défauts, toutes les raisons qu'il avait de les aimer. Le portrait qu'il trace de VAmaipne. est digne de former un appendice à l'admirable petite galerie de « monstres à têtes de femmes » à^nsV Avenir de l'Intelligence.

M. Rouveyre a su parler de Moréas avec non moins de goût et le plus vif sentiment de la poésie. Ce qu'il dit d'Eryphile et de ce qui distingue un Moréas d'un Henri de Régnier est d'un esprit critique excellent.

Mais je pense que l'on goûtera surtout, dans ce livre de sou- venirs, les pages consacrées à Guillaume Apollinaire. On peut trouver quelquefois qu'il admire trop le poète de Calligrammes, mais non qu'il ne l'admire pas bien, ou qu'il l'admire à contre- temps. Il a raison au surplus de donnera Calligrammes une place importante dans l'œuvre d'Apollinaire. Une bonne part d'Alcools passera, bibelots pour amateurs et marchands de curiosités ; au contraire tous les poèmes de circonstances, écrits dans la guerre, sont parmi les plus beaux de ce temps. Cela, comme l'a marqué M. Rouveyre, parce « qu'il s'intéressait à toutes les « choses qu'il était appelé à faire ou avoir. Et sa pensée mar- « chait toujours de pair avec ses gestes, les entourant d'une « lumière de spirituelle magie ».

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