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INAHILE IBATAN, TIRAILLEUR DAKOMEEX 323

qu'il a commis lui-même et en expiation duquel il souftVe depuis plusieurs jours. 11 prend donc bien garde de ne pas le dénouer. Ma situation est devenue très embarrassante et je suis bien aise de pouvoir en sortir à la faveur d'un petit incident.

Un élève retardataire frappe à coups redoublés et assez violents à la grande porte, faute d'avoir osé, ou su tourner la clé. On devine qu'il se désespère et toute la classe en est amusée. Je vais moi-même Taccueillir pour le ramener en riant.

— Alors, Yatma Gueye, tu ne sais pas encore forcer notre porte depuis trois mois que tu viens ici ? Si tu ne connais pas le métier de cambrioleur après quatre ans de service et de guerre, qu'est-ce qu'on fait donc dans ton bataillon ?

Yatma Gueye s'étouffe à force de rire, car c'est un grand rieur et pour mettre à profit cette disposition, toutes les plaisanteries, même un peu lourdes, lui sont bonnes. Presque tous les élèves s'égayent avec lui.

Inahilé, lui, n'a rien entendu. Maintenant tout le monde conjugue oralement le verbe vouloir qui se traduirait par « y a content » en espéranto militaire colonial. Il faudra l'écrire ensuite. Inahilé n'a pu réciter et il aligne distraite- ment : je veux, tu veux, il veut, nous veunons, vous veu- nez. Je dénonce, en ce verbe étrange, la confusion avec venir et Inahilé de lui-même corrige et met le passé indé- fini en train. Mais à peine l'ai-je quitté que je le vois s'ar- rêter encore et poser sa plume ; puis, peu après, il place ses livres les uns sur les autres, rêveusement.

— Je vais faire travail au camp. Madame, me confie-t-il quand je passe à côté -de lui.

— Comment, dis-je, tu ne vas pas faire la dictée avec les autres ? Tu ne vas pas non plus finir ton verbe ? Tu n'en as que pour cinq minutes ; je vais t'aider.

— Demain, Madame, je viendrai pour finir.

Les traits d'Inahilé et sa voix sont mornes jusqu'à Tim-

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