Page:NRF 17.djvu/640

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

^34 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Préciser quel enfer était inutile. Je n'ai pas noté tous les pas- sages où l'auteur se plaît à blesser dans ses croyances un lec- teur plein de bonne volonté. J'ai préféré me souvenir du plai- sir que j'ai goûté à lire, par exemple, le récit de Chéri-Bibi au commandant Barrachon, récit essentiellement poétique :

Mon père, un esprit simple qui ne cherchait pas midi à quatorze heures (tome I, p. 93)...

Costaud ! (le policier) Lui et la Fatalité se donnaient la main. Un soir de janvier brumeux et glacé, je les rencontrai tous deux dans un bureau d'omnibus (t. I, p. m)...

Je me rappelle encore la page oià le cuisinier La Ficelle dit à Chéri-Bibi, combattant les soldats du vaisseau : « Prends garde à droite ! Prends garde à gauche » comme, ne manque pas d'ajouter l'auteur, le fils du Roi Jean à Poitiers. A propos d'éru- dition, si j'ose dire, je constate que M. Gaston Leroux, ou quel- que typographe a déformé deux vers de Jules Lacroix, tels qu'en eux-mêmes assez médiocres déjà :

Enfants, du vieux Cadmus jeune postérité. Pourquoi vers ce palais vos cris ont-ils monté.

J'ai passé naguère assez de dimanches à l'amphithéâtre des Français pour connaître le début d'Œdipe-Roi. On trouve aussi dans Chéri-Bibi une recette culinaire indiquant la manière de pré- parer la morue hollandaise. Le second volume ne vaut pas le premier lequel relate agréablement la révolte des forçats. L'épi- sode des naufragés étonnés par les façons de l'équipage et par le langage qu'il parle, est amusant :

Vous êtes un bon zig 1 fit M^e d'Artigues, mais qu'est-ce donc que des galuches ? (tome I, p. 185).

Changer les rôles, bon « truc » romanesque dont se servit joliment Edgar Poe dans Le Système du Docteur Goudron et du Frojesseur Plume, nouvelle que cette partie du livre de M. Gaston Leroux rappelle involontairement.

Corsaire romantique, Chéri-Bibi change de peau comme ses ancêtres Fantômas ou Rocambole. Après avoir insolemment comparé son sort à celui d'Œdipe ou celui d'Hamlet, le héros se jette dans un brasier, mais, phœnix incombustible, il ne tar- dera pas à renaître de ses cendres. Lire la suite dans...

GEORGES GABORY

�� �