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Page:NRF 18.djvu/173

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soldatesque et par conséquent débauchée au plus haut point. (Je parle du peuple.) Si je n’avais pas rencontré des âmes sympathiques, je crois que j’aurais été perdu. Konstantin Ivonitch Ivanor a été un frère pour moi. Il m’a rendu tous les bons offices possibles. Je lui dois de l’argent. S’il vient à Pétersbourg remercie-le. Je lui dois vingt-cinq roubles. Mais comment payer cette cordialité, cette constante disposition à réaliser chacun de mes désirs, ces attentions, ces soins ?… Et il n’était pas le seul ! — Frère, il y a beaucoup d’âmes nobles dans le monde.

Je t’ai déjà dit que ton silence m’a bien tourmenté. Mais je te remercie pour l’envoi d’argent. Dans ta plus prochaine lettre (même dans la lettre officielle, car je ne suis pas encore sûr de pouvoir te donner une autre adresse), donne-moi des détails sur toi, sur Emilia Theodorovna, les enfants, les parents, les amis, nos connaissances de Moscou, qui vit, qui est mort. Parle-moi de ton commerce : avec quel capital fais-tu maintenant tes affaires ? réussis-tu ? As-tu déjà quelque chose ? Enfin pourras-tu m’aider pécuniairement et de combien pourras-tu m’aider par an ? Ne m’envoie l’argent dans la lettre officielle que si je ne trouve pas d’autre adresse ; en tout cas, signe toujours Mikhaïl Pétrovitch (tu comprends ?) Mais j’ai encore un peu d’argent ; en revanche, je n’ai pas de livres. Si tu peux, envoie-moi les revues de cette année, par exemple les Annales de la Patrie.

Mais voici le plus important : Il me faut (à tout prix) les historiens antiques (traduction française) et les nouveaux[1] ; quelques économistes et les Pères de l’Église. Choisis les éditions les moins coûteuses et les plus compactes. Envoie immédiatement. Je suis détaché à Sémipalatinsk, presque dans le steppe Kirgize. Je t’enverrai l’adresse exacte. En attendant, voici : Sémipalatinsk, à l’homme du 7e bataillon de ligne de l’armée de Sibérie. C’est l’adresse officielle ; elle te servira pour les lettres (n’oublie pas de signer Mikhaïl Pétrovitch). Je t’en donnerai une autre pour les livres. — Le premier livre dont j’aie besoin, c’est le lexicon allemand.

J’ignore encore ce qui m’attend à Sémipalatinsk. (L’avenir immédiat m’intéresse peu.) Mais l’autre avenir m’est moins

  1. Vico, Guizot, Thiers, Ranck, etc. (note de Dostoïevsky).