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Page:NRF 18.djvu/179

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DEUX LETTRES DE DOSTOÏEVSKY I73

c'est le héros. Cela s'arrange ainsi. Je dois fournir ce person- nage. Se développera-t-il sous la plume ? Et imaginez-vous les choses épouvantables qui m'arrivent : en plus du héros il y a encore une héroïne, par conséquent deux héros. Et en plus de ces deux héros, il y a encore deux caractères tout à fait impor- tants, c'est-à-dire presque des héros (quant aux caractères secondaires dont je dois tenir scrupuleusement compte, ils sont en nombre infini, et le roman est en deux parties). Deux de ces quatre héros ont déjà leurs traits bien marqués dans mon âme, le troisième ne se dessine pas encore, et le quatrième, c'est-à- dire le principal, le héros, est fort pâle. Peut-être qu'il se tient solidement dans mon cœur, mais il est terriblement difficile à faire. Il faudra en tout cas, pour écrire cela, avoir deux fois plus de temps au minimum,

La première partie est faible, à mon avis. Mais il me sem- ble qu'on peut encore sauver les choses parce que rien n'est compromis et il est possible de tout développer d'une façon satisfaisante dans les parties qui vont suivre (oh, si cela pou- vait être !). En somme, la première partie n'est qu'une intro- duction. Une chose est nécessaire, c'est qu'elle éveille un cer- tain intérêt pour ce qui suivra. Mais je ne puis vraiment pas juger de cela. Je n'ai qu'un lecteur, Anna Grigorievna. Cela lui plaît beaucoup ; mais elle ne peut être juge dans mon cas.

Dans la seconde partie tout doit être définitivement mis en place (mais sera loin d'être éclairci). Il y aura là une scène (des principales), mais me réussira-t-elle ? J'en ai pourtant fait une esquisse, et c'est bien.

En général, tout est encore dans l'avenir ; mais j'attends de vous un jugement sévère. La deuxième partie décidera de tout. Elle est la plus difficile, mais vous m'écrirez aussi au sujet de la première ("bien que je sais très sincèrement qu'elle n'est pas bonne), écrivez-moi tout de même. De plus, je vous en sup- plie, dès que le Messager Russe paraîtra, faites-moi savoir si mon roman est publié. J'ai une peur horrible d'être malgré tout arrivé en retard ; or il m'était de la première importance de paraître en janvier. Au nom de Dieu, prévenez-moi immédiate- ment, afin que je le sache, en deux lignes au moins.

En envoyant à Katkov la première partie, je lui ai écrit

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