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LE TRIPTYQUE DE M. A BEL HERMANT 273

mi-juillet 19 14, la préparation de l'Allemagne dès cette date, notre angoisse des premiers revers, notre confiance en dépit d'eux ; ces grandes choses nous sont montrées dans de menus faits, dans l'atmosphère d'une répétition générale le 14 juillet 19 14, dans les impressions de Phi- lippe lors d'une dernière traversée de l'Allemagne quel- ques jours plus tard, dans une entrevue furtive de Rex et de ses parents sur un quai d'embarquement à la fin d'août ; mais l'auteur a su, dans la peinture de ces petites scènes, faire sentir toute la grandeur qui les sous-tend, comme un de ses maîtres jadis avait su peindre tout le mouvement d'une grande bataille dans les avatars d'un petit troupier et d'une vivandière le long d'un chemin de traverse. Puis c'est le deuil de la famille française, Rex « porté disparu », la douleur des parents si poignante dans sa dignité, dans son silence, dans sa pure inté- riorité. Enfin, Rex n'étant que prisonnier (avec un bras en moins) et interné en Suisse où Philippe monte le voir, c'est, chez le quinquagénaire, la reconnaissance mêlée de vénération pour le jeune héros sorti de lui. M. Abel Hermant illustre ce sentiment en rappelant dans la mémoire de Philippe un mot qui aurait été réellement prononcé, celui d'un pauvre paysan dont le fils était mort à bord d'un sous-marin coulé et qui aurait dit : « Il me semble que mon fils est devenu mon père. » L'auteur a traité ces mouvements d'âme relatifs à la guerre dans un tel symbolisme qu'on dirait que ce mot est de son invention et que c'est la réalité qui Ta pris à l'artiste.

��Quelles que soient ces beautés, la haute valeur de l'ou- vrage me semble être ailleurs et dans la peinture de choses apparemment plus humbles.

Elle est dans la peinture d'Oxford, du ravissement du jeune Philippe à découvrir la cité élue, le charme de ses prairies, la poésie de ses vieilles pierres, à embrasser la

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