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NOTES 503

pas moins les formes vivantes, ainsi que le montrent ses nom- breux portraits suffisamment individualisés. Il me reste à signa- ler, à part, la tendance puriste, dont Ozenfant et Janneret recher- chent les éléments régulateurs ; des artistes comme Lotiron, Kisling, Desgarets dont l'aimable caprice refuse de se plier à une discipline collective et, enfin, les quelques probes artisans, de tout le monde connus, qui tirent de l'impressionnisme ou du fauvisme assagi des effets toujours agréables.

ANDKÉ LHOTE

LETTRES ÉTRANGÈRES

LETTRE D'ALLEMAGNE.

Jamais peut-être l'Allemagne n'avait produit autant de bio- graphies qu'en ce moment. Le lecteur veut savoir à qui il a affaire, il désire connaître l'homme, avant de pouvoir croire à l'artiste ou au penseur. La pensée a perdu son anonymat, et l'œuvre d'art ne saurait se suffire à elle-même. Cela tient évi- demment aux circonstances. Des idées, nous en avons assez, semblent dire les contemporains ; ce que nous cherchons, ce sont des hommes, ou plus exactement l'homme nouveau. Il y a ici un certain messianisme, qui mêle à toutes les aspirations, je ne sais quelle foi naïve, quelle attente impatiente de cet homme à venir.

Toutefois le besoin d'humaniser pour ainsi dire l'œuvre d'art, ne date pas d'aujourd'hui. Déjà bien a-vant la guerre, il s'était développé en Allemagne une sorte de pragmatisme, un vitalisme spirituel, qui concevait les idées comme des mo3'ens dont l'individu se sert pour organiser sa vie, assimilant telle impression, rejetant telle autre et affirmant à travers tout sa volonté d'être lui-même. Pour pouvoir apprécier une idée, il faut la rendre à l'individu ; tandis que les idées changent et s'entre-détruisent, il reste la seule réalité profonde.

Aussi le biographe devint-il un personnage fort important, puisque c'était en somme lui qui retrouvait derrière l'idée, la pensée, derrière l'œuvre d'art, la vision, et restituait à la vie ce qui de droit lui appartenait. Refaisant en sens inverse ce que le penseur et l'artiste avaient fait avant lui, il ressuscitait les idées et les visions les rendant à leur destinée première.

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