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Page:NRF 18.djvu/703

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LE CAMARADE INFIDÈLE 697

Thomas reprend :

— Quant à ses sentiments à elle....

— Eh bien ?

— Je suis trop soupçonneux pour être tout à fait lucide... Et pourtant... Est-ce vraiment le passé qui l'inté- ressait ? Je me trouvais devant un être encore tout ébranlé, à qui l'articulation de certains mots faisait mal. Mais ses questions ne tendaient pas à découvrir de nouveaux faits soit à la charge soit à l'excuse de son mari ; elles visaient beaucoup plus à pénétrer les mobiles de ta dissimulation... Je t'ai dit que M""= Heuland ne mendiait rien. Elle n'im- plorait pas de raisons pour te justifier, mais soi enquête même, qui visiblement lui coûtait tant d'effort, s'expliquait- elle sans une admiration pour toi ?...

Vernois se fâche :

— Je t'en supplie !...

— ... sans une admiration ingénue qui fait qu'à ses yeux tout s'effondre si tu viens à chanceler.

— Non, non, ne me rends pas ridicule. D'ailleurs vois- tu ça que tes suppositions soient justes et qu'il faille leur donner le sens que tu indiques ! Qu'après ces beaux débuts, et ces scrupules, nous soyons si piteusement dupés par nous-mêmes et que nous finissions, après tant de tracas et d'embarras, par où deux enfants auraient eu l'intelligence de commencer. Même si le danger n'est qu'imaginaire, tu as bien fait de m'avertir. D'ailleurs elle est charmante, elle n'est pas niaise, elle a une fierté qui me plaît, et des mains, et un beau sourire, et plus encore d'intuition et de doigté que je n'aurais cru, puisqu'elle a su te retourner en moins d'une heure, mais il ne s'ensuit pas que je l'aime. Je suis même certain du contraire. Et si je découvrais qu'elle s'in- téresse à moi pour d'autres raisons que celles qui nous ont rapprochés, j'ai idée que du coup je cesserais d'éprou- ver de l'admiration pour elle.

— Tu soutiens parfois, dit Thomas en le considérant»

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