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Page:NRF 18.djvu/714

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Puis elle se décide à le lui tendre, mais comprend aussitôt l’absurdité de son espoir.

— Ma pauvre amie, un bouton allemand…

C’est trop pour elle que le surcroît de cette petite déconvenue. Elle a hâte de quitter ces fondrières désolées. Elle remonte vers le premier sentier, mais avant de l’atteindre se retourne encore une fois du côté de la vallée abrupte où, durant tant d’années, a commencé la terre interdite. Ce décor, du moins, avec ses pentes rousses et ses falaises, est commun aux deux emplacements entre lesquels hésite et se déforme l’image qu’elle poursuit vainement.

— C’est en regardant cela qu’il est mort, murmure-t-elle.

Par pitié Vernois s’abstient de répondre ; mais, dans son désarroi, elle a besoin de certitude :

— Faisait-il du soleil comme aujourd’hui ?

— Du soleil… Non.

Aussitôt il comprend que toute imprécision lui est suspecte et que la vérité est moins dangereuse :

— Il faisait un léger brouillard qui a permis l’effet de surprise… Jamais Heuland n’a vu cette vallée… que sur les cartes.

Il reprend la tête de la petite colonne. Dans la charmante clarté, les questions d’Antoine se pressent, se bousculent, parmi des cris à demi-voix, poussés devant les débris de toute sorte qui déjà ne trouvent plus de place dans ses poches. Qui sait les épouvantes que l’enfant a craintes et qu’il sent conjurées ! Étourdi par la réaction, il n’est plus qu’ardeur et confiance. Il insinue :

— Est-ce que les Annamites ont aussi ramassé les casques ?

Après tout, la mémoire d’une chasse heureuse peut aider à défendre de l’oubli l’émotion de cette journée, et Vernois se tourne vers Clymène :

— Si vous vous reposiez un moment. Nous entrerons dans les réseaux pour tâcher de trouver un casque.