Page:NRF 18.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avec de l’argent on peut acheter du sucre
avec du sucre on attrape des mouches.

Petitmathieu m’expliquait son bonheur :

— Ce qu’elle est marrante ! Avec ça, bonne fille. Et quand il faut, les petits plats, les compresses, tout le reste. Et un cocher au mois qui sonne de la trompe et qui connaît les champignons. Pleine d’instruction et de conversation, faisant rire en société. Pour le particulier, une peau avec des veines comme les fleuves sur les cartes de géographie, une tignasse jusqu’aux talons (pas ces trois tifs qu’ont les femmes au jour d’aujourd’hui, et qui ne fatiguent pas le peigne fin), une poitrine urf, du vrai frigorifié ; et puis se mettant au plumard avec application et n’y allant pas que d’une fesse ; se lavant les dents après les repas, prenant les asperges avec une pince exprès pour, et pas de corset :

— Vous verrez, dit-il, quand vous la connaîtrez mieux.

L’orchestre jouait un boston qui était des montagnes russes. De cimes exquises, on était précipité dans les vallées langoureuses des refrains. Des comédiens à mâchoire poudrée arrivèrent, après le théâtre. Ils voulurent danser, mais le peuple les traita de feignants, de crâneurs, de mangeurs de saucisson.

Je laissai Petitmathieu en pleine verve, amusant son public, faisant semblant d’être couché avec Léa dans sa cabine.

Je dus promettre de revenir le lendemain pour le grand coup et de passer la nuit.

Sixième nuit, 158 heure, 3962 k. 570. Même spectacle monotone. Harassés, les écureuils dormaient en tournant ; l’un accrochait une roue et tombait, entraînant les cama- rades. On entendait des cris anglais, des jurons turcs, une clameur parfois, qu’expliquait un abandon ; puis la ronde recommençait.