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près comme Rollon baisa le pied de Charles le Simple, en l’élevant jusqu’à ses lèvres et en jetant le roi sur le dos : « Ce qu’on peut souhaiter de plus charitable à ce puant, écrit-il à propos de Zola, c’est de crever demain, de pareils maudits ne pouvant qu’aggraver l’inexprimable rigueur des châtiments éternels. » Et M. Daudet doit se reconnaître en cette femme dont parle Saint-Simon, laquelle avait supprimé de son Paier le passage sur le pardon des injures. Ce qu’un pamphlétaire de cette nature apprécie en l’Eglise, c’est qu’elle a un enfer. Les polémistes de gauche sont handicapés par la mauvaise qualité de leur enfer, aussi médiocre que leur paradis et terrestre comme lui. La Ter- reur, la Commune, le bolchevisme, ces pauvres petits enfers terrestres ne supportent pas la comparaison. Les rouges de Paris ont eu pendant trente ans leur polémiste en Rochefort : un néant ! Le seul grand écrivain que ce côté politique ait pro- duit, c’est Vallès. M. Vanderem signalait avec raison l’oubli dont il est victime, oubli scandaleux, qui d’ailleurs s’explique par des raisons étrangères à la littérature : l’auteur de l'Enfant aura évidemment moins de lecteurs et surtout de lectrices que l’auteur de Monsieur, Madame et Bébé ! Mais fermons cette parenthèse, et revenons à Mistral. La critique du Midi, celle de M. Maurras, de M. Lasserre, de M. Daudet, de M. Carrère, aime Mistral, considère Iviistral comme un centre d’intelli- gence et d’action, formule une discipline mistralienne. Mais ensuite, ou plutôt d’abord, et surtout, elle aime Mistral contre quelqu’un, elle le prend comme point d’appui dans une attaque, elle formule une doctrine anti-romantique. Les étrangers, qui s’étonnent de nous voir continuer aujourd’hui des disputes vieilles d’un siècle entre le classicisme et le romantisme, voudront bien considérer que c’est là, en partie, un rythme de notre vie intellectuelle française au xix^ siècle, un moment naturel dans l’existence d’une nation qui constitue un ménage du Nord et du Midi, un dialogue jamais achevé entre le Nord et le Midi.

Je réussirais assez mal à définir le Midi littéraire par ce qu’il est, et il m’y faudrait tout un livre. Mais je mettrais beaucoup moins de temps aie définir par ce qu’il n’est pas. Le Midi n’est