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486 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

tié versifiée du recueil. On pourrait mieux employer cette vir- tuosité facile qui, surveillée, deviendrait un charme.

Quant à la méditation qui préface le volume, elle exprime gracieusement plusieurs banalités. Ici encore il pourrait être fait meilleur usage du mirliton. « Je suis à recommencer », s'écrie M. J.-V. Pellerin. Qui eût osé le lui dire si crûment ?

PAUL FIERENS

LE ROMAN

MYRRHINE COURTISANE ET MARTYRE, par Pierre Mille (Ferenczi).

M. Pierre Mille vient d'écrire un roman antique. On s'y atten- dait peu. Pierre Mille est une intelligence, un observateur, un moraliste. Ce n'est pas un animateur ; jusqu'ici, il a paru avant tout raisonnable. Or, pour écrire un roman historique, il faut s'halluciner soi-même. Cela peut paraître étrange, c'est ainsi. Nous nous intéressons peu à l'Histoire, et beaucoup à l'auteur. Les Martyrs, Notre-Dame de Paris, Salammbô, ne valent que par l'imagination. Et aussi peut-être l'Histoire de Michelet, les Ori- gines de Renan.

Pierre Mille a une forme de l'imagination : l'humour, la fan- taisie. Sur un trait de mœurs observé, il sait bâtir une histoire caricaturale qui, exagérant le trait de mœurs, le fait sentir et le ridiculise. Il sait aussi reproduire la réalité en l'analysant, en la disséquant. Si Barnavaux est sous ses yeux, il ne le dessine pas en deux coups instinctifs, il le décrit par petites touches. Il est donc le contraire d'un faiseur d'épopées.

Ce n'est pas une épopée qu'il a voulu écrire, bien qu'il ait repris le sujet des Martyrs : la dernière grande persécution des chrétiens. Epoque trouble, toute jaillissante d'enthousiasme et de folies. Pierre Mille s'efforce de nous montrer que cette épque fut banale, que les martyrs furent des hommes ordinaires. C'est une idée divertissante à soutenir, un paradoxe, le sujet d'un conte. Je ne sais pourquoi Pierre Mille a pris un ton si grave, a écrit plus de 200 pages, pourquoi il a bourré son livre de notes prises à l'Anthologie, aux Actes des Martyrs ou aux ouvrages des spécialistes. C'est beaucoup d'embarras pour une idée si frêle, si peu justifiée. Il y a bien plus de vérité dans Polyeucte que dans tous les héros de Myrrhine. Les parfums les

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