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NOTES 49 1

ravages exercés par l'opium sur le bon goût de ceux qui en usent dans leurs livres, sont bien grands.

L'ouvrage qui nous occupe échappe à tout reproche de cette sorte. L'auteur décrit des scènes et des sentiments nécessaire- ment flottants avec un remarquable souci de la nuance juste et un parfait sens de la mesure. Aucune exaltation de mauvais ton ; rien qui sonne creux dans sa fumerie. Et certains passages, plus aérés, laissent voir que ces qualités peuvent s'appliquer aussi bien à l'observation de la nature et du réel.

JACQUES DE LACRETELLE

  • *

L'ENLISEMENT, par Jean Monique (Rieder).

Il s'agit de l'enlisement progressif du « pion » dans le répéti-

torat. Nulle déclamation, nul didactisme, une série de notations

justes et sensibles. Deux très beaux chapitres : celui où le pion

« chahuté » réussit à remonter le courant et à « mater » son

étude de « moyens », et celui où il s'abandonne à la boisson.

Le reste du livre inspire une vive sympathie pour la sincérité et le talent de l'auteur, mais ne va pas sans monotonie. Les impres- sions s'égrènent un peu au hasard, sans avoir le charme du tout- venant impressionniste. Elles ne nous sont pas livrées d'une façon assez directe, elles sont trop transposées, sans former cependant un ensemble construit.

Les matériaux de la bâtisse sont rassemblés, la maison n'est

pas construite. C'est dommage, les matériaux étant (pour dire

vite) d'une qualité analogue à ceux de Charles-Louis Philippe

et ce livre étant de ceux qu'on n'écrit pas pour s'amuser, mais

avec tout le sang de son cœur.

B. CRÉMIEUX

L'OPHÉLIA, histoire d'un naufrage, par Mariits-Ary Lebland (La Sirène).

Certainement le livre est réussi, car il est pathétique, pre- nant, et tenace. L'imagination demeure occupée de cet îlot, mince et triste, au ras d'une mer étincelante où les coraux, comme de grands pièges à navires, brûlent en couronnes de lumière sous les eaux tropicales...

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