Page:NRF 19.djvu/761

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

notes 759

une certaine façon qu'il a de rater son but, c'est une certaine faillite de ses intentions qui constituent la poésie de son travail. Mais justement cette faillite n'est possible que, si au début de son effort, le peintre ne se propose rien d'autre que de réussir à expliciter ses intentions avec netteté, s'il force en quelque sorte son subconscient à se réveiller, à s'insurger contre la pression d'un système tyrannique adopté avec une résolution trop vive.

C'est pourquoi, quelque attrait que puissent avoir ces délasse- ments extasiés des peintres du dimanche, il faut à regret leur dire adieu, et bien se garder de tomber dans le travers de ces artistes du Nord, qui s'intitulent « naïvistes », et qui ne se pro- posent rien moins que d'oublier leur connaissance de la technique moderne et de ressusciter en eux leur enfance et leur naïveté évanouies !

Quand nous entrons au Salon d'Automne, nous nous sentons bien loin du « naïvisme ». Sauf chez quelques attardés, il n'y est plus question de singer les primitifs ; ce faux hiératisme de Musée, qui faisait fureur il y a quelques années, a presque entièrement disparu. Ces mêmes incorrigibles plagiaires, qui sont les grotesques de l'art, suivent une autre piste. Le grand Ingres est, hélas ! à la mode : vite, il faut « en faire ».

Quant aux véritables courants qui se partagent l'activité des artistes, on ne les voit plus guère se dessiner qu'à leur source. Si les placeurs de l'automne, cette année plus avisés que ceux des Indépendants, avaient, comme ceux-ci l'année dernière, mélangé les tableaux sans se préoccuper des préférences théo- riques de leurs auteurs, il serait difficile de distinguer qui, de Pierre ou de Paul, se relie au Cubisme ou au « Naturalisme organisé ». Les jeunes peintres qui par un savant decrescendo se placent entre les salles extrêmes où brillent d'un éclat inac- coutumé Braque et Léger côté cubisme, Segonzac et Vlamirck, côté naturalisme, cultivent la formule dite « Constructive ». Il s'agit, on le sait, d'un art qui repose sur la consolidation des formes naturelles à l'aide d'éléments géométriques adoucis et d'un mortier pictural plus ou moins épais. Nous voici aux anti- podes de l'état d'esprit des primitifs de la Galerie Simon ! Au Salon d'Automne, — qui, je tiens à le déclarer, fut rarement aussi riche en bonnes œuvres — une recherche strictement technique motive la presque totalité des toiles exposées. On l'a

�� �