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Page:NRF 1909 1.djvu/84

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80 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pus retenir ma confidence et lui parlai longuement de mon amour que du reste il connaissait déjà. Il avait cette année acquis quelque pratique des femmes, ce qui lui permettait un air de supériorité un peu fate mais dont je ne m'offensais point. Il me plaisanta pour ce que je n'avais pas su poser mon dernier mot, comme il disait, émettant en axiome qu'il ne faut jamais laisser une femme se ressaisir. Je le laissais dire, mais pensais que ses excel- lents arguments n'étaient bons ni pour moi ni pour elle et qu'il montrait tout simplement qu'il ne nous compre- nait pas bien.

Le lendemain de notre arrivée, je reçus cette lettre :

Mon cher "Jérôme,

y ai beaucoup réfléchi à ce que tu me proposais, (ce que je proposais ! appeler ainsi nos fiançailles !) J'ai peur a" être trop âgée pour toi. Cela ne te paraît peut-être pas encore parce que tu n'as pas encore eu l'occasion de voir d'autres femmes ; mais je songe à ce que je souffrirais plus tard, après m 1 être donnée à toi, si je vois que je ne puis plus te plaire. Tu vas findigner beaucoup, sans doute, en me lisant ; je crois entendre tes protestations ; pourtant je ne mets pas en doute ton amour : simplement je te demande d'attendre encore que tu sois un peu plus avancé dans la vie.

Comprends que je ne parle ici que pour toi-même, car pour moi je crois bien que je ne pourrai jamais cesser de f aimer

Alissa.

Cesser de nous aimer ! Mais pouvait-il être question de cela ! — J'étais encore plus étonné qu'attristé ; mais si bouleversé que je courus aussitôt montrer cette lettre à Abel.

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