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412 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

à cause de cette indiscrète passion dans une voix si douce ;

et à cause d'un corps si suave qui a purifié l'amour.

On croyait encore à l'été, et c'est l'automne. Une insinuante douceur s'est glissée le long des jours. Le ciel n'a plus la dureté du feu, ni la route ne danse à l'horizon entre deux toits de tuiles. Tout est calme. Un corbeau va d'éteule en éteule ; un maillet cogne au bout de la vigne, dans la hutte où sont les tonneaux ; entre les mottes du guéret frais, la harpe des fils de Vierge joue une mélodie d'éternelles fiançailles ; et c'est l'époque où la jeune veuve, laisant éparpillées sur la table les lettres qu'elle relisait, va mettre des baisers de miel dans le cœur des roses-trémières.

Quelle discrétion dans l'enchantement, quel repo- sant bonheur ! Comme l'azur du ciel est touchant, avec l'insensible dégradation qui l'amène, derrière les arbres, à la couleur même de leurs feuilles ! comme la lumière est généreuse de se poser partout avec une égale tendresse et, quand son éclat se retire, de laisser après elle ce long rayonnement pur et tiède qui, vivant sous la nuit jusqu'à la pro- chaine aurore, en est comme l'immortelle substance et la chaleureuse nudité ! — Ah, n'est-ce pas trop beau ? n'est-ce pas trop paisible et trop riche ? N'est-

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