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422 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Allemagne votre pensée ne serait pas accueillie sans protestations. J'ignore si elles se sont formu- lées, mais je ne vous cacherai pas que ce qui m'en est parvenu jusqu'en ma solitude dans ce Man- chester allemand qu'est Chemnitz, laisse deviner une vive mauvaise humeur.

Mais ni cette mauvaise humeur, ni ce désir de formuler une opinion opposée ne m'induiraient à vous écrire, si je ne me sentais pas... coupable; complice du moins ; coupable moins d'une faute personnelle, que d'un mal inhérent à la forme actuelle de notre culture ; coupable quand même.

Je suis un de ces Allemands, peut-être très nombreux, qui vous ont dit combien ils avaient à lutter contre leur propre langue et combien ils envient à la littérature française son moyen d'ex- pression souple, élaboré, plastique.

Même si l'on s'en tenait à ce sentiment, il resterait à examiner si la passion de créer des formes ne recherche pas la matière la plus résistante et la plus ingrate. La trop grande souplesse d'un instrument toujours prêt à servir ne fait-elle pas aisément oublier la dignité du métier, de sorte que l'on trouve beaucoup d'hommes qui parlent bien, mais que, parmi ces nombreux talents, le " créateur de langage " ne peut se faire jour que difficilement ? Grave question que je me contente de poser, mais qui marque la première bifurcation de notre route. Quand même on accorderait le

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