Page:NRF 5.djvu/600

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

594 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pitalité. Je l'avais un peu retapée. Elle était retour- née à l'atelier, un jour, et c'avait été pour moi un bien beau jour. Elle rentrait dans l'existence régulière, son parti était pris de ses malheurs. Elle faisait des rêves innocents. Un soir elle me disait : Je vais louer une petite chambre à côté, rue St. Martin, et nous pendrons la crémaillère. Nous ferons un fricot épatant. J'achèterai un poulet. C'est précisément la nuit où elle me racontait cela qu'on est venu frapper à ma porte, à 3 h. du matin. Une femme se nomme. J'ouvre, et la femme entre, accompagnée d'un marlou énorme et d'un autre jeune homme qui était le bonhomme à Maria. Ils avaient découvert son adresse et venaient chez moi pour la chercher. J'ai vu là une scène lamentable. Je n'avais aucun droit sur elle. Je n'étais pas en force. Je pense qu'elle ne protestait pas pour ne pas m'attirer de désagréments. Enfin, après m'avoir juré "sur sa conscience d'homme" qu'il ne lui ferait aucun mal, le bonhomme l'a emmenée. Voilà. 11 y a 8 jours. Je ne sais plus ce qu'elle est devenue. On doit lui avoir soigneuse- ment interdit ma maison, et ça me fait beaucoup de peine parce qu'elle deviendra maintenant une prostituée. Elle ne se soignera pas, elle sera bientôt vicieuse comme celles de son métier, et elle ne tardera pas à mourir. Je te raconte bien mal ces choses, mon cher Henri. Et puis il faudrait avoir connu cette jeune fille d'une intelligence supé-

�� �