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142 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

historiens, de tous les hommes de goût, de tous les hommes de sens, de tous les hommes de droiture et de fécondité, de tous ces hommes en un mot qui formaient un peuple cultivé dans le peuple, dans un peuple plus large. Ce sont deux existences qui ne sont pas du même ordre. L'existence dans le corps des producteurs de tout un peuple est une existence de vie. L'existence dans les rayons, sur les rayons de quelques bibliothèques est une existence de mort. Surtout étant donné ce que sont les blibliothèques modernes. Un poète qui gisait manuscrit, ignoré, incompris, non lu non lisible en quelque monastère perdu n'était lui-même ni un poète perdu ni un poète mort. Quelque moine pieux, méritant notre éternelle reconnaissance, pouvait le soigner, le conserver, le reco- pier, nous le transmettre enfin. Il n'était donc pas mort. Il vivait donc pour la vie à venir de l'humanité. Un poète, connu, compris, classé, catalogué, qui gît imprimé aux rayons de cette stérile Bibliothèque de l'Ecole Normale et qui ne serait point quelque autre part, qui ne serait point couvé dans quelque coeur, est un poète mort.

TRADUCTIONS

M. Paul Claudel transcrit pour nous ce passage de la traduc- tion de Tacite par Nicolas d'Ablancourt, en le faisant suivre d'un commentaire que l'on pourra lire plus loin :

L'Histoire de Tacite

ou la Suite

des Annales

de la Traduction de Nicolas Perret

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