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M. D ANNUNZIO ET L ART I I

il veut le faire Dieu ! — Sébastien est " le sagittaire à la chevelure d'hyacinthe ", " celui qu'Apollon aime ", le " bel archer d'Emèse ". Il est aussi le beau chanteur : il coupera les cordes de la lyre d'Orphée ; il est aussi le beau danseur : il dansera la Passion ! On le couche douillettement — car il est beau — sur la lyre mutilée ; le cortège des femmes le pleure ; il va périr sous les couronnes, sous les colliers, sous les parures — car il est beau. De ce premier supplice, notons que la Légende Dorée ne dit rien ; il fut subi par d'autres saints, et M. d'Annunzio avait le droit d'en faire usage. Il prit à cela un certain plaisir : c'est un supplice luxueux ! — D'ailleurs, S* Sébastien en réchappe. Il succombera, comme le veut la tradition, au der- nier acte, sous les flèches de ses archers.

— Ils sont condamnés à frapper leur chef ; de quelles paroles de viril respect, de noble camara- derie, ne vont-ils pas différer l'exécution ? quels cris douloureux et rudes une telle hauteur de conflit leur commande ? — Non, ils n'auront qu'un mot : " Aimé, bien-aimé ", mot de femme. Et le saint, éperdu, sentira sous la pitié le désir, et réclamera d'eux, comme une volupté sensuelle, la souffrance.. .

Je vous le dis^je vous le dis :

celui qui plus profondément

me blesse, plus profondément

m'aime. . .

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