Aller au contenu

Page:NRF 6.djvu/336

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

330 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

ter était située un peu en dehors et ne donnait aucun signe de réveil au moment où j'y arrivai. Je pris le parti de monter au jardin qui se trou- vait disposé en pente sur un des versants de la colline. J'y marchai dans l'ombre jusqu'au sommet. Au moment précis où j'atteignis celui-ci, le soleil dépassa l'horizon, et je me trouvai au milieu d'une si violente allégresse matinale, que j'en faillis chanceler.

Les oliviers gris et les graves eucalyptus frémis- saient sous la pluie d'accords que le soleil tirait de leur feuillage. D'énormes boules de mimosa, humides, trop lourdes, se tenaient immobiles, comme si elles avaient craint de laisser choir leur faix de perles jaunes. Dans l'herbe et les aspho- dèles, la rosée étincelait. Nulle douceur, mais une sorte de griserie à jeun, un déchaînement de sons métalliques, comme de fifres et de cymbales, un cri clair et fou. Sur les feuilles rondes des cactus guerriers la lumière tambourinait. Toute cette ferveur me souleva hors de moi-même. Une fois de plus, je m'abandonnai à un muet et téméraire espoir, pareil au condamné qui se remet à croire à la grâce pendant un court moment, tandis qu'on achève les préparatifs.

Au bout de quelques minutes seulement, je songeai à regarder autour de moi. Les crêtes des montagnes dentelaient profondément la haute ligne d'horizon déroulée derrière la colonnade des troncs

�� �