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ADDIS-ABEBA 431

montueux. De secs arabes, jambes nues, la face jaune et fourbe, cheminent en silence auprès d'eux et, comme leurs bêtes, narguent de l'œil en passant notre informe cohue. A droite, en contre-bas, se répand parmi les verdures, cette partie de la ville qui s'est groupée autour du lac d'eau chaude. Les toits ronds des toucoules, de toutes parts, émergent des feuillages, des haies fleuries d'ombelles violettes. Mais pas un bruit ne s'élève, c'est une ville endormie. Le Guebbi, dont nous longeons ensuite la haute enceinte de terre battue, paraît plus désert encore. Ici, pourtant, entre les hangars inachevés, les murailles formant ruelle, les magasins et les appentis, ces bâtiments de tous genres et de tous styles dont l'ensemble disparate constitue la résidence de l'Empereur, c'est tous les joiu^s un va-et-vient incessant, un fourmillement de soldats, de courtisans, d'esclaves. Sur les marches des escaliers, des solliciteurs, des Grecs, attendent patiemment le bon plaisir du ministre auquel ils ont demandé audience. Quelle confusion, quelle presse, sous les portiques et dans les cours, quand passe un chef sur son mulet, au milieu d'une escorte d'hommes pieds nus, trottant, se bousculant, le fusil couché à plat en travers des épaules. Des enfants jouent autour des cuisines, des mendiants rôdent et de vieux prêtres en bonnet blanc, plus avides de la femme qui les accueille que des reliefs dont elle remplit leur manteau. Aujourd'hui, comme ailleurs, la vie ici est sus- pendue. Les cours intérieures, les ruelles en pente s'éten- dent au soleil, nues et vacantes. Enhardis par la solitude, des milans sont perchés sur la tôle des toits et, du bec, se lustrent les plumes. — C'est presque une surprise, aussi bien, en passant devant la porte de l'ouest, de découvrir.

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