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d'aDDIS-ABEBA a DJIBOUTI 669

Le soir tombe. Une clarté rose adoucit les lignes dures des roches dressées. Les bandes d'oies, une à une, s'envo- lent et disparaissent en criant. Pour couper au court, je monte la colline droit devant moi, au milieu des pierres qui se détachent et roulent. L'ovale vert du petit lac, dans son cadre de sable et de sel, apparaît, sitôt qu'on s'élève, d'une beauté qui saisit : une sorte de brume nocturne déjà se répand sur ses eaux balancées. — Au sommet de la colline, petit cimetière galla : des tas de cailloux marquent les tombes ; vm amas plus haut, c'est celle d'un chef, un cordon de grosses pierres l'entoure. Une lumière tranquille et dorée emplit la plaine. Les mimosas jettent une ombre distendue sur les herbes jaunes où l'on entend les pintades se rallier à grands cris pour le jucher du soir.

Au campement, tandis que je prends un tub en plein air, devant la tente, les nagadis s'occupent de brûler un mulet. Le bât a fendu l'échiné. Pour que la plaie ne s'envenime pas, ils la cautérisent. Cinq hommes pèsent de toutes leurs forces sur l'animal renversé, ficelé comme un paquet : deux tiennent la tête, deux autres les pattes, le cinquième est assis sur la croupe, tandis que le maître- muletier enfonce son fer rouge dans le trou de la blessure. La bête se débat faiblement. Ses flancs creux halètent, elle souffle, et une odeur affreuse de viande et de cuir brûlé empoisonne l'air suave de la nuit.

... Limpides et précises étoiles, je vois leur reflet vif étinceler dans le courant de la Modjo qui fait un bruit doux à mes pieds. Une brise délicate pénètre par la porte large-ouverte de la tente où je m'attarde, fondu dans la douceur de cette heure délicieuse. La flambée de mes

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