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Page:NRF 6.djvu/701

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d'aDDIS-ABEBA a DJIBOUTI 695

enclos entourant deux blocs allongés : le plus haut, encore debout, indique à la mode arabe la place de la tête, l'autre gît, brisé, sur les pieds du mort. Mes hommes, comme d'ordinaire, ne savent rien. Une si longue histoire a passé sur ce pays que toute tradition s'y est rompue, tout souvenir effacé. " Autrefois, me dit pourtant l'un d'eux, un géant musulman a occupé l'Abyssinic ; il est venu jusqu'ici avec son armée. Il s'appelait Gragne. " Et puis c'est tout, ils n'en savent pas plus long. Ils se sont répan- dus dans le vallon ; avec curiosité, ils fouillent les buis- sons, me hèlent à grands cris à chaque tombe nouvelle qu'ils mettent à jour. Sitôt qu'ils retirent le bâton dont ils soulevaient le rideau de feuillage, les pierres usées, les pauvres enclos de cailloux se font invisibles à nouveau sous les épines...

Nous regagnons lentement le camp. La clarté du couchant prend en enfilade les grands arbres que nous retrouvons au sommet de la colline. Elle illumine leurs cimes étagées, allonge des ombres obliques sur la terre rougeâtre et poudreuse. Brusquement, à quelque cent pas, deux antilopes, d'un bond admirable, s'élancent d'un massif de tamarins et dévalent la pente raide, la tète rejetée en arrière pour que les cornes ne se prennent pas aux branches. Je n'ai pas eu le temps d'épauler : elles sont déjà loin. J'en demeure un peu bougon. Dans les oliviers, les tourterelles se hâtent de jeter leurs derniers cris : de toutes parts, leurs appels retentissent, perçants et préci- pités : dès que la flamme rose du jour a cessé d'éclairer la branche où l'oiseau était posé, ils s'arrêtent net. La fraîcheur du bain, derrière la tente, me rassérène. Douceur de l'air du soir. Ma mauvaise humeur cède à sa suave

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