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998 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

C'est dans son puits que les Frébault, avec sa permission, prenaient l'eau fraîche dont ils avaient besoin, chez elle qu'ils se réfugiaient en cas d'orage. Ils se connaissaient depuis des années, puisque la mère Catherine était allée à l'école avec la défunte mère de la Chipée.

Quant au Louis, lorsqu'il allait encore à l'école, lui aussi, mais plus régulièrement qu'autrefois sa grand'mère Catherine, et qu'il avait ses jeudis libres, chaque fois que l'occasion s'en présentait il accompagnait son père à leur champ de Richâteau. Il n'y venait pas surtout pour travailler, mais pour jouer avec Lucienne. Elle n'était qu'une petite paysanne, tandis que lui pouvait passer pour un citadin ; mais elle portait un joli nom, d'abord, et elle avait un visage si délicat que l'on s'étonnait qu'elle pût être la fille de la Chipée. Un obscur instinct dont ils n'étaient pas maîtres les rapprochait l'un de l'autre, les faisait s'asseoir ensemble derrière la haie. Ils tournaient autour de la maison, jouant à cache-cache. La Chipée n'avait pas le temps de s'occuper d'eux. Jusqu'à ce jeudi où, l'année d'avant sa première communion, — oui, madame, c'est un peu fort, n'est-ce pas ? — M™* Frébault avait surpris le gamin à embrasser la gamine qui se laissait faire. Une paire de gifles pour lui. Pour Lucienne, sa mère se chargerait de la corriger. Puis défense, pour lui, de se soustraire à la surveillance de son père, et de sa mère quand elle était là, et obligation de travailler. C'était déjà le commencement.

Un peu plus âgée que Juliette, un peu moins jolie peut-être, elle l'avait connue, à une classe de distance, chez l'institutrice, et à une année d'apprentissage près, chez M"* Clément. Il y avait aujourd'hui à peu près trois

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