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I026 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

fait, pourquoi les éviter ? Entre deux découvertes pathétiques ou pittoresques, — je n'ai même pas honte, cher ami, de fumer une cigarette sur la place Victor-Emmanuel qui est bien à cent lieues du " Quattrocento ". Je m'y sens bien. Et j'aime aussi le sous-sol sombre de la trattoria où j'ai coutume de dîner dans un bruit de rires et de chants vulgaires. C'est que Florence continue d'y vivre et avec une certaine grâce, avec une certaine noblesse qui relèvent même le laid. Quand je rentre chez moi, des musiciens malhabiles, accotés à l'appui du quai, braillent dans la nuit rousse des valses misérables, soutenues dans un autre ton par une ou deux guitares aigres, qui ne connaissent qu'un accord. Or, tout cela, tout le tissu de ma journée, je le déploie en m'endormant... et chaque soir, je m'émerveille de le trouver si continu, sans un " clair ", sans une reprise.

Passer du mort au vif et d'hier à demain, des images de l'homme à l'homme, de la fiction au réel, ou réciproquement, cela n'a point de sens ici. Tout continue. Du musée à la rue on ne sent point le pas. On va, on vit et on pense selon Florence, dans une certaine allégresse lucide qui naît du lieu et qui n'est pas fort éloignée de celle qu'on ressent à Paris. — Et qu'on ne dise pas ville d'art ! Ce n'est pas l'art qui a rayonné sur la vie, mais bien la vie sur l'art. Dans cette atmosphère propice la vie fait voler tous ses germes, et les plus

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