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1050 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

et les tigres peuvent s'y tromper. Mais à l'égard des tigres selon la nature, la Cité est le tigre qui pense. C'est en vain qu'ils font corps contre les hommes : les hommes font société contre les tigres. Les hommes ne valent rien qu'en société ; mais leur société est puissante. Tous ensemble, ils viennent à bout des tigres. Cependant, le tigre les fait trembler un à un.

Les vrais athées sont rares, même sous Néron. Plus rares encore les vrais anarchistes. L'homme affirme peu dans la négation. Et les plus rares de tous, les sceptiques parfaits qui doutent également s'ils nient et s'ils affirment.

Ce tigre grossier de Bonnot, comme il meurt en mordant, il n'est pas sûr de son droit à mordre. 11 avoue son crime, puisqu'il prétend disculper ses complices. Il ne croit pas à son innocence, puisqu'il les dit innocents.

J'aime mieux l'injure qu'il répète jusqu'au dernier souffle, et qui est le pouls de son agonie. Là, du moins, il est bien ce qu'il est : le tigre selon la nature en guerre avec le tigre de la Cité ; et il se sert des armes qui lui sont propres. Il est rare qu'on ne meure pas dans ses vrais mots, qui sont la peau de l'âme : " Salauds, salauds ! " Voilà son mot, digne de lui et d'un sale héros, à la fin de son rôle.

Il faut en prendre son parti : il y a de sales

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