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Page:NRF 8.djvu/193

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NOTES 187

dérablement la tâche qu'on s'est imposée. Ce système repose, même pour les impartiaux, sur une erreur fondamentale. Une œuvre une fois concassée, disséquée, démantibulée, ne répond plus du tout à ce qu'elle était. Telle phrase dément partielle- ment l'idée qu'elle défendait par sa situation au milieu du livre. Telle construction qui paraît défectueuse examinée isolément s'explique aisément dans un ensemble. Telle partie à bon escient lourde, trop chargée, raboteuse ou maigre peut être citée comme une imperfection, où elle suivait normalement le mouvement de la pensée, la volonté de l'auteur. Avoir du style, c'est plier son verbe à toutes les situations, c'est trouver constamment des harmonies, des rapports nouveaux, établir des équilibres, des valeurs adéquates au sujet, mobiles comme les multiples faits qui le meuvent, et cela sans rompre l'unité... "

Voilà une page bien pensée, mais qui nous désigne à la fois les qualités — et les défauts — de la critique telle que l'envi- sage M. Alexandre Mercereau. Il s'intéresse plus au " général " qu'au " particulier ", plus aux " idées " qu'aux œuvres même, plus à la conception qu'à l'exécution dans l'art. Et c'est tant mieux, du reste, en ce temps de critique à vue courte et tatil- lonne. Mais cet effort tout à fait exceptionnel, suppose une somme énorme de connaissances et de lectures, une rare habileté à grouper autour d'une idée toutes les idées dépendantes, autour d'un problème toutes les opinions et tous les témoignages. Je conseille à tous ceux qui ont leur siège fait, à tort ou à raison, sur l'enseignement du latin, de lire par exemple le volumineux article que M. Mercereau consacre à la question dans La Rttéra- ture et Us Idées nouvelles ; ils y sauront trouver matière à réfléchir et peut-être à modifier leur point de vue. Car cette émotion encyclopédique n'entrave pas la démarche neuve de l'idée ; l'auteur en s'effaçant devant les écrivains qu'il cite, ménage sa rentrée en lice à point voulu : sans doute épouse-t-il le plus d'attitudes possibles, mais pour fortifier la sienne en secret, dans le jeu des contradictions. Comment donc échapperait-il tou-

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