RÉFLEXIONS SUR LE ROMAN 215
teur et son élève. Vous jouirez d'une belle courbe de pensée historique.
Comme le jongleur qui offre à la Vierge l'hum- ble tribut de ses pauvres tours, Taine, sur cette aurore des jeunes socratiques, écrivit sa thèse latine. De personis Platonicis^ devenue son article sur les Jeunes gens de Platon. Je l'imagine, adoles- cent, lisant Platon comme son voisin lisait Daphnis et Chloé, arrivant en fin de compte, avec cette thèse, à un triste alibi comme celui de ce voisin qui franchissait un seuil toléré. Nous sommes de pâles Epigones...
Mais ce sont là raisons à côté, et sentimentales. Pourquoi le roman de la jeune intelligence n'a-t-il pas été écrit, quand depuis un siècle tant de romans parfaits de l'enfance sont nés ? Je dis romans, et non souvenirs, ou plutôt je dirai souvenirs en tant qu'ils deviennent des romans, en tant qu'ils trans- forment l'enfant réel que l'on fut et que l'on ignore en l'enfant possible que l'on construit et que l'on croit avoir été. Peut-être l'enfance et l'adolescence sont-elles pour le roman deux matières très inégalement observables et fécondes. L'enfance paraît claire, limpide, spontanée, elle se livre, elle a sa vie et sa logique à elle, qui sont harmonieuses et complètes. L'adolescent est tout eti secrets inavoués, en demi-teintes, en malaise et en transition. L'enfance marque un état et l'ado- lescence un passage. Pour l'artiste, pour le roman-
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