Aller au contenu

Page:NRF 8.djvu/304

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

298 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Et aussitôt il fut au bas de l'escalier et moi derrière lui. Mais il ne fut pas le premier médecin arrivé sur le terrain. Tout, dans l'admirable organisation de cette entreprise, avait été prévu. Un pigeon fut lancé aussitôt, et un médecin officiel et un brancard officiel apparurent, comme par miracle, dans le même instant. C'était extra- ordinaire. J'en étais frappé d'étonnement.

— Il l'a bien cherché ! dit un homme non loin de moi, tandis que j'hésitais au bord de l'océan de boue.

Alors j'appris que c'était Manchester et non pas Knype qui avait pâti. La confusion et le brouhaha étaient trou- blants et gênants au plus haut point. Mais un sentiment du moins en sortait clairement : du plaisir. Je le sentis moi-même. Je ressentis de la joie de ce que les deux camps étaient maintenant égaux à dix hommes chacun. Je m'identifiais mystiquement avec les Cinq Villes ; j'étais absorbé dans leur vie. Je pouvais lire sur chaque visage que la providence divine était dans cette affaire, et qu'on ne se moquait pas de Dieu impunément. Et moi aussi j'avais cette conviction. Je pouvais encore lire sur chaque visage la crainte de voir l'arbitre donner un " déloyal " au héros Myatt ou même le faire sortir du terrain, bien que, naturellement, la fracture ne fut qu'un simple accident. Je vis confusément des agents, un bran- card, un courant de foule, et mes oreilles entendaient un monstrueux et universel tumulte de voix. Puis la forme de Stirling se détacha du mouvant désordre et vint à moi.

— Eh bien, le tibia de Myatt était plus dur que celui de l'autre, voilà tout, dit-il.

— Lequel est Myatt ? demandai-je ; car les poupées rouges et les poupées blanches avaient disparu lorsque je

�� �