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Page:NRF 8.djvu/615

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MIGUEL MANARA 609

Ce n'est que Johannès, le gibier de potence, que

l'on a relâché l'hiver dernier, après quatorze ans de galères. On ferait bien de le tuer comme un vieux chien

qu'il est. Quand on lui jette un os, il se met à prier, pour

se moquer de vous, et puis revient, à l'heure grise, voler la pâtée du

chien des honnêtes gens.

DON MIGUEL. —Johannès ! Johannès ! M'en- tends-tu .?

JOHANNES. — Vous êtes le saint moine Manara.

Je reconnais votre voix. C'est une douce voix.

DON MIGUEL. — Johannès, recommande ton

âme à Dieu ; tu as la face d'un homme qui va mourir.

JOHANNES. — Hélas, non. L'heure n'a pas

sonné. Ne vous inquiétez pas, bon moine. Hélas, non. Malgré mon grand âge et ma faiblesse

et ma douleur. Dieu me refuse le sommeil. Il me faudra vivre

des jours et des jours, des nuits et des nuits ; ramper comme le ver, gémir comme l'essieu que l'on n'a pas graissé, disputer l'os sans moelle au chien abandonné.

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