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LES DIEUX ONT SOIF 63 1

sourde, irritée, une seule âme, une bête mystique, qui par l'exercice naturel de ses fonctions, produisait abondam- ment la mort. " C'est trop peu que cette simple mention.

Pour donner l'équivalent d'une atmosphère qu'il ne crée pas, l'auteur essaie de nous enjôler par mille petits renseignements empruntés aux estampes, aux images de modes, aux bibelots, au mobilier, au jargon de l'époque. Il pastiche les discours, il pastiche les sentiments et les pensées. Cela est soigné, mesquin et irritant. Que pour reconstituer tant soit peu ce que fût la vie au quinzième siècle, il soit nécessaire d'utiliser les allusions d'un acte de vente et de tenir compte des moindres mots d'un grifiFon- nage, nous en prenons, à contre cœur, notre parti. Mais nous avons, sur l'histoire d'il y a cent ans, des documents d'autre nature, et nous ne pouvons supporter qu'au lieu de choisir parmi tant de récits et d'événements chargés de vie, on ne fasse appel, pour nous renseigner, qu'aux enseignes de rues et aux couvercles de tabatières.

Lorsque Anatole France mêle à son récit quelque événement connu, c'est avec je ne sais quelle application scolaire et non avec cet imprévu qui donnerait au fait un rayonnement nouveau. La mère de Gamelin raconte à son fils son enfance : " H lui souvenait du jour où Joseph Gamelin, coutelier de son état, l'avait demandée en mariage. Sa mère lui avait dit : " Habille-toi. Nous allons sur la place de Grève, dans le magasin de M. Bienassis, orfèvre, pour voir écarteler Damien. " — Et quelques lignes plus loin : " Je te mis au monde, Evariste, plus tôt que je ne m'y attendais, par suite d'une frayeur que j'eus, étant grosse, sur le Pont-Neuf, où je faillis être renversée par des curieux, qui coiu"aient à l'exécution de M. de

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