LETTRES A FANNY BRAWNE 67
pas autant que vous le voudriez. Mon enfant chérie, je vous aime à jamais et sans réserve. Plus je vous ai connue plus je vous ai aimée. Et de toutes façons — mes jalousies mêmes ont été des agonies d'amour et dans les plus violents accès que j'en ai eus, je me serais fait tuer pour vous. Je vous ai trop fait souffrir. . . mais par amour ! Je n'y peux rien. Vous êtes toujours nouvelle. Le dernier de vos baisers est toujours le plus doux ; votre dernier sourire le plus brillant et le dernier de vos mouvements le plus rempli de grâce. Quand vous avez passé devant ma fenêtre, hier, en rentrant, je vous regardais avec autant d'ad- miration que si je vous avais vue pour la première fois. Vous m'avez exprimé, une fois, le vague reproche que je ne vous aimais que pour votre beauté ! N'ai-je donc rien à aimer en vous que cela ? Ne vois-je pas un cœur auquel la nature a donné des ailes, s'emprisonner avec moi ? Les plus tristes perspectives n'ont pu détourner vos pensées de moi un instant. Il se pourrait que ceci fût un sujet de peine aussi bien que de joie — mais je ne veux pas en parler. Même si vous ne m'aimiez pas, je vous porterais la même absolue dévotion : combien plus profonde ne doit-elle pas être, sachant que vous m'aimez !
Mon esprit a été le plus tourmenté, le plus inquiet qui se soit jamais trouvé enfermé dans un corps, trop étroit pour le contenir. Je ne l'ai
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