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LES POÈMES 907

M. de Bouhélier consacre une des notes de l'Appendice à expliquer sa prosodie. " Dans mes premiers poèmes, réunis vers la vingtième année, sous le titre à'Eglé, je ne pratiquais pas, écrit-il, le vers libre ; mais enfin les règles de la prosodie clas- sique, si étroites et si compliquées ne m'avaient pas encore entièrement soumis. — Aujourd'hui, par contre, je trouve à celles-ci un grand charme. Plus l'esprit rencontre de contraintes, plus sa qualité s'affirme et dans ces petites compositions si excentriques au fond et si parfaitement artificielles que l'on appelle des poésies, la jouissance provient en partie du senti- ment qu'on Y peut jouir de combinaisons inconnues dans la nature. Je sais bien d'ailleurs, que pour le véritable artiste la licence apparente du vers de Gustave Kahn n'offre pas moins de commandements que la prosodie de Racine ou de Rimbaud. Mais pour mon goût propre la technique traditionnelle, loin de n'éveiller en moi que des émotions monotones, me semble extraordinairement riche, prodigieusement captivante. — Du reste, ajoute-t-il, personne n'admire davantage ce qui se fait dans des sens différents, chez Emile Verhaeren par exemple, chez Francis Vielé-GrifHn et chez Paul Fort. "

Le point de vue est défendable, mais il s'agit de rechercher, si vraiment sous la contrainte classique, l'esprit de M. de Bouhélier affirme mieux sa qualité et si en s'astreignant à observer toutes les règles — ou à peu près (et cet à peu près dans le cas présent m'indispose) — son vers a gagné en aplomb, en éclat, en variété. Je crains que M. de Bouhélier aujourd'hui ne se soumette guère qu'à la lettre, nullement à l'esprit des règles qu'il vante. C'est bien, puisqu'il le veut ainsi, de respecter — à peu près — la loi des césures (chez lui, le mode ternaire est très fréquent), de faire alterner régulièrement le masculin et le féminin à la rime, d'invoquer Racine et Rimbaud. Mais si malgré l'observance des règles, trop souvent un vers enjambe sur l'autre, si la mesure juste n'est souvent obtenue que par un renfort superflu de conjonctions, si le rejet bondit parfois même

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