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928 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

d'aristocrates, de quarante millions d'aristocrates, ayant tous leur fierté, leurs besoins de loisirs, leurs élans retenus, leurs réticences. Il n'y a qu'une chose qui voile ce phénomène ; la mauvaise éducation, les rudes paroles, une obscénité qui n'a pas l'excuse d'être inconsciente ; mais des aristocrates peuvent être mal élevés, cela s'est vu. Et ce qui était bien aristocratique encore, c'est la conviction intime, naïve et tout à fait irraisonnée, que Louise partageait avec Barnavaux, d'être du même rang que n'importe qui, en France, et d'un rang supérieur à tous les étrangers... "

Les voilà donc en ménage, et Barnavaux n'a pas raconté trois histoires, que déjà leur naît un enfant. Et comme Louise touche vingt sous par jour comme fille-mère, alors "ça ne serait pas à faire " que le père reconnaisse son fils. Trois histoires, et l'enfant meurt. Barnavaux porte sa tristesse avec pudeur, comme Louise ses amours : " Les mobiles sentimentaux, les seuls au fond qui les conduisent, les Français aiment bien qu'on leur en parle, mais non pas dans le particulier ; au théâtre ou au café-concert seulement ; là oia il est permis de supposer que ce n'est pas de vous qu'il est question, mais du voisin. Bien rarement, au contraire, on admet une allusion personnelle ; on la supporterait mal, on ne serait plus maître de soi, et ce n'est pas convenable. " Barnavaux obtient pour l'enterrement quatre jours de permission, quatre jours de prison l'attendent au retour : n'a-t-il pas trompé la bonne foi du capitaine, puisqu'il s'agissait d'un enfant naturel î Et Barnavaux ne comprend plus : " Qu'est-ce qu'elle veut, la France, quand est-ce qu'elle a raison ? " ; quand elle paie vingt sous à la mère ? ou quand elle ne veut rien savoir de l'enfant ? " Tout ce que je demande, c'est qu'on se décide. Comment voulez-vous qu'on connaisse sa place, comment voulez-vous qu'on serve, comment voulez-vous qu'on obéisse ? Je deviens comme tout le monde ici... Je n'obéirai plus ! " Ainsi se marque le conflit " entre un idéal antique, cohérent comme tout ce qui est ancien, et un idéal

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