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les conquêtes du commandant belormeau

il est temps de mettre Valentine au ménage et de la ramener à des idées plus pratiques et plus saines ; n’ayez donc pas tant de frayeur de gâter ses jolis doigts.

Mme Michel baissa la tête d’un air confus et soupira ; elle reconnaissait l’excellence de la morale de l’aïeul, mais elle sentait que sa faiblesse lui rendrait bien difficile sa mise en pratique.

Tandis qu’on s’occupait ainsi d’elle, Valentine, après avoir longuement procédé à sa toilette, s’était rendue chez son oncle François.

Elle aimait fort la maison du brasseur, moins riche, moins confortable que celle de ses parents, mais combien plus animée et plus vivante. Elle aimait sa tante Émilie et ses sonores éclats de rire, les garçons francs et gais ; Gertrude, toujours avenante, et surtout Minna dont l’aimable humeur et le clair bon sens, étaient comme un réconfort pour sa nature rêveuse, un peu faible, que son éducation avait encore amollie.

Comme il était d’usage, Valentine contourna le bâtiment qui donnait sur une rue écartée et passa par la cour, une vraie cour de ferme, car tante Émilie possédait deux vaches, des chèvres, des poules et des dindons. Comme la jeune fille mettait le pied sur le seuil de la cuisine, elle aperçut sa tante, rouge, essoufflée, en tablier et en manchette de toile blanche, s’affairant au milieu d’un amas de victuailles.

Relevant sa jupe à deux mains, Valentine avançait, avec hésitation, son pied menu chaussé d’une fine botte de satin, la bonne dame éclata de rire.

— Tu tombes bien, ma nièce, s’écria-t-elle ; la maison est sens dessus dessous !

«  Tiens, embrasse-moi, ajouta-t-elle, en tendant son visage rubicond, d’abord prestement essuyé du revers de sa manche, et file ailleurs.

— Tante, je vois que vous avez tué un porc.